Séries

Les Reines, ou la souveraineté retrouvée (Biennale Photo Climat 2023)

Trente-deux reines de France sont enterrées à la Basilique Saint-Denis. Les vitraux rappellent la place qu’elles ont prises dans l’histoire de France. Elles reposent au cœur de cette ville de Seine-Saint-Denis où il est pour les femmes plus difficile qu’ailleurs de s’épanouir. Parce qu’elles portent la charge mentale de leurs familles et vivent souvent dans un contexte de grande précarité, il y a dans cette présence royale un anachronisme, presque une provocation de l’histoire. On visite, regarde, admire les reines de France, mais des souveraines d’aujourd’hui, celles qui portent l’avenir d’un royaume ébranlé sur leurs épaules en travaillant, montant des projets locaux, élevant des enfants et soutenant leur communauté, on fait peu de cas.

Cette série, en cours et dont les premiers portraits sont exposés Place de la Bastille pour la Biennale Photo Climat 2023 met en lumière ces parcours de femmes qui, par leur résilience et leur courage sont les reines d’aujourd’hui.

Des photos des vitraux de la Basilique sont projetés sur leurs corps, comme pour les couronner, bâtir des ponts entre ces destinées que tout sépare. À la manière du Kinsugi (l’art de la réparation japonais, où les poteries cassées sont recollées avec de la feuille d’or, ce qui les rend plus précieuses qu’avant la brisure), les vitraux esquissent sur les peaux une mosaïque de vie, un morcellement réparé, une fierté retrouvée.

Vaillantes – Exposition dans l’espace public à Colombes (92)

Le quartier du Petit-Colombes est « populaire ». Depuis le centre-ville bourgeois, on le regarde parfois avec condescendance, comme si personne ne choisissait d’y vivre. Il est vrai que tout n’est pas parfait ici, mais les femmes ont mille idées pour améliorer le quotidien de ce quartier plein de richesses. Pour mettre en valeur sa diversité, le rendre plus accessible, plus joyeux, plus vivant, plus vert, pour créer des liens et inventer une nouvelle manière de les nouer.

Pendant plus de trois mois, un groupe de femmes s’est réuni pour imaginer ce qu’elles pourraient métamorphoser dans leur espace si on leur en laissait le pouvoir.
Puis nous avons créé ces images, comme un programme politique joyeux et humain. Un programme possible. Demain ?

VOIE.X, artistes sous contraintes (Prix Roger Pic 2020)

Comment peut-on vivre en tant que peintre, sculpteur, danseur, réalisateur ou poète au milieu du désert mauritanien, de la jungle papoue, de la misère malgache, de la censure brésilienne ou de la théocratie iranienne ? Comment faire de l’art son métier quand il est la dernière priorité du gouvernement, qu’aucune structure de diffusion n’existe ou qu’il est muselé par la censure ?

La série VoiE/X propose des portraits d’artistes qui posent l’acte de création comme un acte de résistance dans des pays où vivre de l’art est une gageure. Loin d’être misérabilistes, ces images suggèrent surtout que la contrainte n’est pas un mur infranchissable, mais une incitation à l’inventivité, au contournement, voire au détournement. En tout cas à l’action. Comme les détails se cachent autant dans les lignes de fuite que dans celles du visage, Sandra Reinflet réalise ses portraits au grand angle. Une manière d’esquisser une géographie intime où le sujet et son environnement sont liés, de gré ou de force.

Cette série personnelle a été pour partie publiée en portfolio dans le magazine l’Obs, présentée sur Arte dans l’émission 28 minutes, exposée dans des festivals collectifs (Les Femmes s’exposent, Nuit photographiques de Pierrevert, Photographiques du Mans), a reçu le prix Roger Pic 2020 de la SCAM et celui des membres de Carré sur Seine.

La peur à la porte


Et si on jouait à déjouer la peur ? Cette série de portrait (en cours de développement) interroge notre rapport aux phobies, aux complexes, à tout ce qui nous empêche physiquement ou mentalement d’oser. Peur du vide, de vieillir, d’être surveillé, de son reflet, de l’enfermement, du bégaiement, du noir, de la maladie, de tomber amoureux… Et si la mise en scène de ces peurs les atténuaient ? Si on pouvait changer d’angle pour y voir une définition de nous-même, une singularité, une forme d’esthétique personnelle ? Si on les dédramatisaient ?


TANJA

Série réalisée en Finlande en 2014.

En Finlande au mois de juin, le soleil se lève à 03 heures et se couche à minuit.
Au mois de décembre, il se lève à 10 heures et se couche à 15 heures.
Tanja elle, se couche à 05 heures du matin et se lève à 15 heures.
Elle vit sous les lumières artificielles, voit le monde en négatifs. Émotions noires sur nuits blanches.
Elle sait pourtant qu’il faudrait se lever. Se forcer à prendre l’air. Profiter du paysage. Pas de drame, pas de bruit, même pas de pauvres ici. Un pays modèle. La chance. Il faudrait s’en souvenir pour rester en surface. Faire la planche. La planche pas le mort.
Respirer. Moins vite. Même quand les angoisses palpitent dans ses veines. Elle les sent dans ses tempes faire de la résistance.
« Il n’y a pas de raison d’aller mal ».
Bien sûr on peut toujours en trouver. Accuser le soleil qui hiberne, l’ennui, l’envie de celle qui est partie… Mais au fond, Tanja ne trouve pas la cause qui la cloue au lit. Elle s’efforce de bouger les bras pour ne pas s’enfoncer. L’eau comme le matelas pourrait l’avaler. Regarder dehors. Cet espace immense. Intérieur, extérieur. Et elle, flottante au milieu.
À la frontière du paysage.

En décembre dernier, Tanja a été hospitalisée. Quatre mois en psychiatrie, jusqu’au printemps.
Seins dressés pour ne pas boire la tasse, elle est, depuis, à l’équilibre. Immobile, elle observe ses paysages intérieurs en attendant d’y remettre de la couleur.

J’ai rencontré Tanja cet été à Helsinki. Elle m’a accueillie chez elle. J’ai ensuite sillonné la Finlande pour reconstituer son puzzle intérieur en images. Ces forêts, ces lacs, ces chalets et ces feux, ce sont ses particules élémentaires.
Pour la première fois, j’ai photographié en noir et blanc. Je voulais voir comme elle. Et poser cette question : Sommes-nous les miroirs des espaces qui nous entourent ?

reinflet_sandra_21
La série Tanja ou les paysages intérieurs a été exposée au centre culturel de Ville d’Avray (92) au mois de mai 2015. Elle a également inspiré la création du clip Landscape Escape.

QUI A TUE JACQUES PREVERT ? (Bourse du talent 2014)

Série photos-textes réalisée en 2013, parus en 2014 dans le livre éponyme. 

Je suis passée devant mon école primaire.
De l’extérieur, il m’a semblé que des carreaux étaient cassés.
J’ai escaladé la grille et l’ai retrouvée éventrée.
À l’abandon.
Au fil des pas, les souvenirs ont ranimé chaque salle, chaque couloir de l’école Jacques-Prévert.
Vingt ans plus tard, rien n’a changé, ou presque.

La série a reçu le prix Coup de coeur de la Bourse du Talent Reportage.

Exposition des images à la BNF de décembre 2013 à février 2014, performance à la Galerie W (Paris 18ème) en janvier 2014, exposition à la MEP de Lille en mai 2014 et présentation in situ sur les grilles de l’école Jacques Prévert à Saumur en juin 2015.

frise BD

Je t’aime [maintenant]

La série est parue dans le livre éponyme (sorti aux éditions Michalon en 2012).
Un voyage dans le temps, à la rencontre des 24 personnes aimées depuis l’enfance.

3 commentaires

  1. Bonjour Sandra. Elles sont pleines de couleurs et de vie ces photos ! Bravo. Est-ce que vous en faite des tirages ? Je verrai bien une de ces fenêtres de lumière chez moi 🙂
    Bon chemin,
    André

Laisser un commentaire